Ronde 9: Victoire de Wang Yue sur Radjabov qui rejoint Cheparinov en tête
Sunday, 10 August 2008
Il est temps de cesser de mentionner les Jeux Olympiques de Pékin et le chiffre 8 porte-bonheur des Chinois et commencer à affirmer que Wang Yue est tout simplement un remarquable joueur d'échecs. Une fois de plus il fit preuve d'une bonne technique dans une finale de Fous battant Radjabov. Il rejoint ainsi Cheparinov en tête qui fit une nulle facile contre Ivanchuk.
Esquiver les lignes théoriques les plus stimulantes aboutit souvent à des nulles mornes et ennuyeuses. Ivanchuk opta pour le coup rare 7.Bd2 dans la Défense Slave, et Cheparinov répondit avec une nouveauté intéressante 9...c5 (bien que l'idée derrière ce coup soit très classique).
Des simplifications au centre devinrent inévitables. La seule question fut de savoir si les Blancs allaient être capables d'entraver le développement des Noirs. Le jeu d'Ivanchuk et l'analyse expresse répondirent par la négative. Les Noirs résolurent facilement tous les problèmes ayant plusieurs alternatives pour égaliser.
L'attaque sur l'aile-Dame qui commença avec 16.a4 mena sur une position de nulle. Cheparinov : « C ‘était une partie stupide. Nous avons simplement tout échangé et puis c'était la nulle. Je n'avais pas préparé cette ligne ce matin, mais je savais que 9.Bd2 n'était pas dangereux ».
La partie Navara-Gelfand en elle-même n'a pas vraiment besoin d'être analysée, mais le choix de l'Ouverture du Grand-Maître Tchèque était bien sûr quelque chose de spécial. « Je n'arrivais rien à trouver de spécial contre la Défense Petroff et ai donc décidé de jouer autre chose ». Pour Gelfand ce fut en fait la toute première fois qu'il rencontrait un Gambit du Roi avec les Noirs. « J'ai commencé à jouer 1...e5 il y a seulement approximativement 5 ans ; avant je jouais seulement des Siciliennes ».
Nous manquons souvent d'audacieuses et spectaculaires parties d'échecs de la vieille école, mais qui devons-nous blâmer pour voir si rarement de tels jeux ? Personne; juste un très haut niveau de jeu et une profondeur théorique.
Navara employa la plus romantique des Ouvertures - le Gambit du Roi (1.e4 e5 2.f4!). Mais... rien de plus! La partie fut totalement logique et sans événement, et finit en nulle. Pas de désordre tactique, ni d'émotion ...
Les joueurs ont rapidement joué tous les coups des livres et finirent dans une structure bien étudiée. La nouveauté 11.Bxf4 ne va pas changer l'évaluation théorique de cette position. 13...Na5! des Noirs assura la sécurité du Roi.
La seule chance pour les Blancs de se battre pour quelque chose de plus qu'une nulle fut manqué au 15ème coup. Bien sûr, il aurait dû jouer 15.axb3! avec un petit avantage sur l'aile-Dame. Après que la Dame Blanche fut bloquée en b3, les Noirs déclenchèrent une avalanche d'échanges (16...Nh5!, 21...Rf8) et tuèrent l'intrigue. Partie nulle.
Une fois de plus Gashimov survécu à une position difficile - cette fois-ci contre Karjakin. Dans une Benoni Moderne il joua le nouveau coup 17...b6, et mit à exécution son idée avec 20...Ra7!, qui permit à la Tour du côté Dame de se déplacer en une fois sur l'aile-Roi. Et là, les Noirs n'égalisent pas dans l'ouverture.
Le 21.b4! donna d'excellentes perspectives d'attaque aux Blancs. Cependant, il ne joua pas la suite de la meilleure des manières.
Premièrement, je (Shipov) n'ai pas compris pourquoi Sergey a rejeté l'invasion 22.bxc5 bxc5 23.Rb8!, et puis, par exemple, 23...Qc7 24.Reb1 f5 25.Bxe5 Rxe5 26.Be2! Ne8 (26...Rf8 27.f4 Ree8 28.e5!) 27.R8b6! - une Tour va en c6, l'autre se dirige vers b8. Les Noirs doivent considérer f2-f4 toutes les fois.
Le deuxième point est encore plus clair. La Dame Blanche après 25.Qg5 semblait comme parachutée dans le camp ennemi, et c'était plutôt inutile là. La situation faisait appel à 25.Be2 Ref8 26.Rf1 avec l'idée de transférer le Cavalier via d1 et e3 à c4. Il est vrai qu'exécuter ce plan n'est pas facile, vu que les Noirs peuvent répondre par 26...Ne8 27.Nd1 Nf6!.
Cependant, dans la partie, les Noirs ont en fait immédiatement encerclé l'envahisseur avec 26...Rf4!, et puis ajouté leur propre Dame à l'attaque avec 31...c4!. Heureusement pour Karjakin, il trouva les contre-attaques 34.Rb7!. Les Blancs sacrifièrent une pièce et forcèrent la répétition de coups.
A l'issue de la partie les joueurs montrèrent quelques lignes dans la salle de presse ; par exemple 27...Bxg4 28.hxg4 h6? qui donne aux Blancs des chances supplémentaires à cause de 29.Qxh6 Rxg4 30.Re3. L'immédiat 30...c4 est moins bon à cause de 31.Bxc8 Rxc8 et puis 32.Qe7 est ennuyeux. Et finalement, 35...Ne8 36.Rxf7 Rxf7 37.Ne3 mène aussi à la nulle à cause de 37...Qxe4 38.Rb8 Rf8 39.Rb7 Rf7 40.Rb8.
La prochaine partie à nous intéresser est celle de Al-Modiahki - Jakovenko, et même le plus grand des sceptiques ne peut pas accuser cette nulle d'ennuyeuse. Nous pouvons imaginer ce discours passionné :
« Qu'y a-t-il de si spécial sur le déroulement inhabituel de la partie ? Cela ne signifie pas que les joueurs étaient créatifs! Une tache dans un cahier peut aussi sembler inhabituel.
Il n'y a rien de spécial sur les Blancs créant des problèmes aux Noirs dans une Sicilienne Rossolimo avec l'insignifiante manoeuvre 14.Qd2! et 15.Qc3. Parfois de telles choses arrivent purement par chance.
Personne n'a été étonné du sacrifice forcé du Pion Noir. Que pouvait-il faire d'autre ? Alors les Blancs ont commencé à se défendre contre l'attaque ennemie aussi bien qu'ils le pouvaient. Ennuyeux.
En somme, les Noirs ont manqué d'égaliser, mais ensuite les Blancs ont commencé à se tromper. Au lieu de 24.Bxd5, ils auraient dû se transposer dans une finale de Fous de couleur opposée. Deux Pions de plus auraient été un joli avantage dans ce cas : 24.Bf1! Nd4 (24...Qc5 25.Qxa6! Re6 26.f5) 25.cxd4 Qxf1+ 26.Kxf1 Bxb7 27.fxe5, etc. Comment un Grand-Maître peut-il manquer une ligne si simple ?
Les Noirs prirent un réel avantage, mais ensuite les Blancs réussirent à coordonner leur pièces avec 29.Ra4!. Cependant, il n'y a rien d'unique à propos de cette manœuvre; des grands joueurs d'échecs de l'époque l'employèrent à plusieurs occasions. Du plagiat !
Finalement Al-Modiahki sortit son arme avec 37.Bg5!. Avait-il pensé qu'aux échecs, comme aux dames, toutes les captures sont forcées ? Cela n'a pas de sens du tout. Bien sûr, les Noirs n'ont pas pris le Fou, et ensuite les deux ont commencé à répéter les coups dans une position peu claire. Honte à eux! »
Notre attitude surprise et respectueuse pour le Grand-Maître Chinois se mue lentement en une attitude de sincère admiration. Il démontra non seulement un self-contrôle typique de la culture Chinoise, une ténacité et une bonne habilité de calculs, mais aussi une excellente formation échiquéenne. Sa finale technique fut de très haut niveau. Aujourd'hui Wang Yue a gagné une autre finale complexe de Fous contre Radjabov, après avoir passé au travers d'un orage de complications obtenant un léger avantage contre un dangereux adversaire.
Radjabov sacrifia un Pion dans l'Est-Indienne Saemisch, joua un nouveau coup 12...a5 (12...Nd7, 12...e6 and 12...Rxd1+ furent joués auparavant) et développa une sérieuse initiative. Pour parler franchement, l'idée des Blancs 14.Bd3 semblait douteuse, mais mon analyse montra quelques manières d'égaliser pour les Noirs. Par exemple : 15...Bxc1 16.Bxb4 axb4 17.Rxc1 Rxa2 18.Nxe7+ Kg7 19.Nd5 Rxb2 20.0-0 b5!.
Cependant, Teimour montra son ambition en ne cherchant pas des positions égales. Il était déterminé à jouer pour la victoire, et manqua le moment où il devait assurer l'égalité. Sa dernière chance fut 19...Rxd3! (au lieu de 19...Rdc8) 20.Rxd3 Bg5 21.h4! (21.Rd7? Bc6 22.Rc7 Be8) 21...Bxe7 (21...Bf6 22.Rd7 Bc6? 23.Rd6!) 22.Rd7 Bc5 23.Rxb7 Rxa2 24.Rd7 Rxb2 25.Rd2 Rb1+ 26.Rd1 Rb2 avec une répétition de coups.
Après cela les Noirs se battirent désespérément pour la nulle, mais la technique de Wang Yue était supérieure à celle de Radjabov. Le joueur Chinois calcula une manœuvre beaucoup plus profonde et plus fine.
Je (Shipov) pense que Teimour aurait pu et dû prendre le Pion central et dangereux des Blancs. Il joua 24...Bxa2, mais j'ai manqué de voir les dangers après 24...Bxe4. Par exemple, 25.Bc4+ Kh8 26.Re1 (26.Rff7 g5!) 26...Bf5 27.Rxe8+ Rxe8 28.Kf2 Bb1!, et les Noirs ne sont pas perdants dans cette finale pointue. Cependant, ceci ne fut pas le moment critique de la partie !
A mon avis, la partie fut décidée dans la finale de Fous. La stratégie passive de Radjabov s'avéra fausse. Il aurait pu transférer le Roi en c5 avec 31...Kd7! (au lieu de 31...Ke7) 32.Kf2 Kc6! 33.Bg8 h6 34.Bf7 (34.Ke3 Kc5!) 34...Kc5! 35.Kg3 (35.Bxg6 Kd5; 35.Ke3 g5) 35...Be4 36.Kf4 Bb1, créant une forteresse infranchissable.
Après, le Grand-Maître Chinois prépara une position de zugzwang (46.Bf5!) et prit le Pion b4. Puis le Pion b6 tomba également. J'ai été impressionné par 55.Ba6! (visant 55...Ke7 56.b5!). Comparé à cela, 58.Bd7! semble vraiment simple.
Les Blancs créèrent un Pion passé adjacent, et assurèrent le gain. Wang Yue devient ainsi l'un des leaders!
Aronian et Svidler transformèrent une ligne calme de l'Ouverture Anglaise en un champ de bataille sanglant. Très tôt, Svidler fut surpris de voir le coup 14.Kh2. « J'avais plus peur de 14.e4 a6 15.f4 b5 16.f5 ».
Les joueurs analysèrent leur partie à l'aide du lap top de votre Bien Cher (PD), et entrant rapidement les coups, Svidler trouva soudainement la ligne suivante : 17.Bxc6 bxc6 18.Qxb8 Qd7 19.g4 Nxg4+ 20.Qxg4 21.Rh1! (à première vue cela semble réfuter l'idée des Noirs, mais...) 21...Qh5+ 22.Kg2 Qg4+ 23.Kf1 Qh3+!! Et les Noirs trouvent la nulle. C'est fou ce que les échecs peuvent être beaux !
Dans la partie, c'est Aronian qui prit l'initiative - 20.c5+!, 22.d4, 23.f3!, mais ensuite il poussa un peu trop fort. A la fin de la partie, il indiqua qu'il aurait dû préférer 27.Rdf1 (au lieu du machiste 27.d5) 27...Qg6 28.R1f3 Rxf3 29.Rxf3 Nf6 30.e4.
Et puis 28.d6 (le préliminaire 28.Qc2! était trop fort) permit aux Noirs le contre-coup 28...Rxg3! qui eut comme effet un Aronian déçu qui commença à commettre plus d'erreurs: 33.Qb5? et 35.e3? qui l'amena au bord de la défaite. Cependant, le Grand-Maître Arménien fut plaisir à ses supporters en continuant.
Après le contrôle du temps, Svidler s'abstint du coup naturel 41...Rd3 (« si je n'avais pas eu autant de temps, je l'aurais certainement joué ! ») ce qui devrait être gagnant après 42.Rxa5 Rd2+ 43.Kg1 Rxd6 44.Rd5 Rxd5 45.Bxd5 Bb5.
Une autre option était 41...Kg7 42.Rxa5 Kf6. Il n'y a pas de garantie qu'il gagne la position qui s'ensuit, mais il y avait une chance, alors qu'après le coup dans la partie, les joueurs allèrent sur une finale de Tours, qui malgré deux Pions de plus pour les Noirs, découla sur une nulle.
Dans la partie Grischuk-Kamsky, l'Américain décida de ne pas tenter le diable en jouant encore une fois la Gruenfeld contre un adversaire aussi bien préparé et dangereux. L'Américain retourna à la Slave Chebanenko et joua une autre partie super solide. Pendant plus de la moitié de la partie Grischuk attaqua les murailles de son adversaire, et pour le reste de la partie il ... dut se battre avec force pour une nulle.
Grischuk loua le coup de son adversaire 8...Bg4 - une forte nouveauté . « Je n'étais pas content de mon 9.Be2 et 10.Bb3 parce que le planifié 11.h3 manqua 11...Bxf3 12.Bxf3 h6! 13.Bh4 Bf6!. »
Les Noirs auraient pu répondre à l'actif 11.e4 des Blancs avec un contre-coup - 13...b6!. Cependant, Kamsky fut fidèle à son style, en cimentant simplement sa défense.
17.Qb6 fut un coup fort qui profita de la maladresse temporaire du Roi sur l'aile-Roi. « 19...a5 n'est pas un problème à cause de 20.Bd2 Ra8 21.Rfc1 Nf6 22.b4, » dit Grischuk, « mais mon 22.Rfc1 était stupide parce qu'ils perdent quelques temi comparé à 22.Rac1. »
Et seulement quant l'adversaire poussa un peu trop fort, Gata livra son coup - 29...Bxe5! 30.Rxe5 Nf6!, obtenant un certain avantage.
Pourquoi cet avantage ne se transforma pas en quelque chose de réel ? Parce que Grischuk se défendit habilement et précisément. Les complications qui commencèrent par 44...e5, forcèrent un finale de Pions.
A l'issue de la partie, Kamsky dit à son adversaire qu'il y avait l'option intéressante du 46. Bc3 Kf5 47. b5 cxb5 48. Rc7 mais les Noirs peuvent probablement obtenir la nulle avec 48...Nxe5+ 49. Bxe5 Kxe5 50. Rxb7 b4 51. Rxe7+ Kd4.
Notre attitude surprise et respectueuse pour le Grand-Maître Chinois se mue lentement en une attitude de sincère admiration. Il démontra non seulement un self-contrôle typique de la culture Chinoise, une ténacité et une bonne habilité de calculs, mais aussi une excellente formation échiquéenne. Sa finale technique fut de très haut niveau. Aujourd'hui Wang Yue a gagné une autre finale complexe de Fous contre Radjabov, après avoir passé au travers d'un orage de complications obtenant un léger avantage contre un dangereux adversaire.
Aronian et Svidler transformèrent une ligne calme de l'Ouverture Anglaise en un champ de bataille sanglant. Très tôt, Svidler fut surpris de voir le coup 14.Kh2. « J'avais plus peur de 14.e4 a6 15.f4 b5 16.f5 ».